Le 3 février lors de la réunion pédagogique de l'équipe pédagogique notre tutrice Michèle Doué a organisé un atelier d'écriture pour nos tuteurs.
L'équipe a choisi le sujet "La vie d'une paire de lunettes". La séance était si amusante et les textes produits intéressant que nous avons décidé de partager nos créations avec vous.
Le texte de Monique :
Après une longue période de repos au fond d'un tiroir dans le noir et à l'étroit dans un étui lui aussi noir, me voici ressuscitée, ballottée, transportée, peut-être une deuxième vie, peut-être plus existante que la première où je passais la plus grande partie du temps sur le nez ô combien rouge du pépé ou égarée par ce pépé tant soit peu amnésique qui ne cessait de répéter "mais où sont passées mes lunettes, qui a pris mes lunettes..."
Un matin, il ne m'a plus cherchée car il s'en était allé tout doucement dans un autre monde et c'est là que mon hivernage a commencé. Une deuxième vie, quelle chance!!!
Je me suis retrouvée entourée de frères et sœurs en partance pour un voyage en avion, destination: une mission africaine. Il faut dire que j'étais assez originale quand même... monture imitation crocodile et dans l'Afrique c'est quand même retour aux sources!
Nous voici donc arrivées à destination, exposées, tripotées, essayées et voilà que je termine mon périple sur le nez d'un sorcier africain: quelle fierté mais il va falloir assurer, pas question de se farder, je deviens presque une personnalité faisant partie du prestige du sorcier. La vie continua ainsi pleine de saveurs, de senteurs, de rencontres jusqu'au jour où le sorcier, un peu malade, trébucha...
Je tombais dans le fleuve et fut happée par... devinez quoi? UN CROCODILE.
Le texte de Francine :
Aie aie aie, dès le réveil je ne sais déjà plus.
Sur la commode ?.. la table de nuit. ?..encore au salon ou déjà dans la salle de bain ? Ah voyons, oui, près de la douche avec déjà plein de buée ! Mais après je serai bien proprette, elle y veille ma maîtresse.
Je l'aime bien elle. Elle est sympa, fait attention à moi, me met dans une boîte quand je ne suis pas sur son nez.
L'autre jour elle m'a amenée dans un magasin où il y a plein de copines, des blanches, des rouges, des noires, des petites, des grandes, des moches, des chouettes, bref je me demandais quand même pourquoi elle me rendait jalouse en essayant des grandes rondes, des petites carrées.. « elles me vont super bien celles-ci et celles-là me font un joli visage, je craque pour celles-ci « Mais enfin elle cherche quoi au juste ? A me remplacer, à me jeter, à me laisser là toute seule avec ces pestes nulles qui n'ont même pas de verres correcteurs comme moi qui lui rend plein de services. Je suis bien là moi quand elle conduit sa mini, quand elle veut lire le menu au restaurant, quand elle voit un beau film, même que parfois elle me mouille quand le film est rigolo ou trop sentimental. Pourrait-elle se passer de moi la grande nunuche ? Bon on part quand de ce magasin, toutes les autres lunettes me regardent de travers, peut-être qu'elles veulent prendre ma place ? Je ne sais quoi trop penser.
Et soudain, miracle, j'entends que serai la première, la plus importante, bref, et l'autre sera la deuxième, au cas où je me casse une branche ou perde une vis et en plus, elle restera dans la boîte à gants. ..
Bien fait, NA.
Le texte d'Emilie:
Je
me souviens de notre première rencontre comme si c’était hier : il est
entré dans le petit magasin de Monsieur S., et tout de suite, j’ai su qu’il
fallait qu’il me choisisse, moi, avec mes jolies montures bleu-vert et mon
liseré jaune.
Bon,
il a commencé par faire le difficile, il n’a pas pu s’empêcher de regarder mes
voisines, il nous a essayées, réessayées... Il a fait le coquet, demandant leur
avis à sa femme, à la femme de Monsieur S., se regardant longuement devant le
miroir... « Et pour le boulot, ça ferait pas bizarre ? » J’en ai
eu des sueurs froides ! Il ne semblait pas avoir compris qu’il devait me
choisir, moi ! Bon, finalement il a retrouvé la raison, posé les vulgaires
choses rouges qu’il avait en main et déclaré : « Va pour
celles-ci ! »
Et
depuis, entre lui et moi, c’est l’amour fou ! Dès le réveil il m’attrape à
tâtons sur sa table de nuit et me pose sur son nez. C’est qu’il serait
incapable de vivre sans moi ! Emue (mais rigolarde !), je l’imagine
partir au travail à moitié rasé si je n’étais pas entrée dans sa vie... On fait
tout ensemble, lui et moi !
Enfin
presque... Il lui arrive de me faire des infidélités, justifiées par d’oiseuses
histoires de « confort ». Quand Monsieur va courir, nager, crapahuter
dans la neige, ou pour je ne sais quels autres enfantillages, il met... des
lentilles ! Mais à chaque fois, en l’entendant pester que la lentille
droite est à l’envers, que la gauche est récalcitrante, en douce, je rigole.
L’amour, le vrai, c’est si facile !
Le texte de Julia :
Histoire naturelle des lunettes
Nous regardons notre maîtresse fouiller de nouveau dans un grand livre. Lequel c'est cette fois-ci ? De l'histoire naturelle ? Mais c'est la nôtre !
Le verre gauche, tu te rappelles le temps où tu étais seul ? Et moi, seul et solitaire aussi ?
La vie était en une dimension, c'était l'étape embryonnaire de la vie des lunettes. Les scientifiques appellent cette phase des "monocles".
Et après comme un têtard sort sa queue, le monocle a fait pousser une pince, a attrapé un autre monocle et ooooh, la vie en stéréo a commencé...
Des dames lorgnent des messieurs en jouant avec la tige qui soutient les deux verres réunis. Vive le siècle galant !
Mais la vie change, les gens veulent avoir les mains libres pour travailler et ne veulent plus nous tourner, astiquer, cacher et faire luire entre leurs mains en gants de soie. Ils nous attellent avec des vulgaires oreilles, comme des chevaux de race en une ... charrue !
Depuis nous menons la vie paisible sur le nez des étourdis qui, en voulant chercher la page sur les illusions d'optique dans l'encyclopédie, nous oublient sur le front !
Le texte de Jean-Bernard :
Oh
je m'ennuie... cela fait des jours et des jours que je suis là dans
les vitrines de l'opticien. Parfois on me regarde.... puis on repart.
Je ne suis rien.
Pourtant
je rêve parfois de me promener sur le nez d'une jolie personne et de
voir d'autres choses, d'autres personnes.
Pourtant,
avant d'arriver dans cette vitrine,on m'a perforée, assemblée,
coloriée pour que je sois la plus jolie et que je plaise. On m'a
passée de main en main, regardée, ...trop souvent reposée à un
autre endroit et avec d'autres voisines qui voulaient, elles aussi,
être prises en main et regardées dans le miroir.
Enfin
aujourd'hui, le grand jour est arrivé, quelqu'un m'a choisie. Mais
ce n'est pas encore le paradis... on m'enlève mes verres, on me
plie, on me tord, que ne faut-il pas faire pour plaire!!. Et puis, je
sors, je vois la lumière, je visite la vie. On me lave, "oh
elles sont jolies ces lunettes".
Mais
elle est fatigante ma nouvelle vie, on me salit, on me frotte, on
m'oublie dans un sac, on m'enferme dans un étui. Enfin, on me pose
sur une table de nuit. Je vais pouvoir me reposer toute une nuit et
rêver... en attendant une nouvelle journée pleine d'émotions.
Le texte de Frédéric :
La
plupart du temps, je dors au fond de ma boîte. Ce sont les jours où
il pleut, où le jour gris passe interminablement. Parfois quand
même, on me transporte, au fond d'un sac ou dans une poche, mais
hélas on n'ouvre toujours pas!
Mais
quel plaisir quand le couvercle s'ouvre! Mon monde s'emplit de
lumière, c'est le grand soleil blanc. Autour de moi, des enfants
crient, on entend le bruit de l'eau, je sens le souffle du vent,
tantôt pur et glacé, tantôt tiède et chargé de fragrances.
Vous
ai-je dit que je suis une paire de lunettes de soleil?
Texte de Martine :
Depuis quelques temps, moi, jolie paire de lunettes, je suis coincée au fond d'un présentoir qui se trouve au fond d'un magasin.
Personne ne fait attention à moi, ne me regarde, ni ne me porte sur le nez.
Suis-je aussi moche ? Ne suis-je plus à la mode ? Je me sens complètement abandonnée, complètement invisible des visiteurs.
Jusqu'au jour où une famille, papa maman et une petite fille, entre dans le magasin.
Je vois les parents faire, comme d'habitude, une choix de plusieurs montures différentes sans même faire attention à moi et demander à leur fille de les essayer.
Seulement, aucune paire ne plaît à la jeune demoiselle.
Ayant décidé de faire son propre choix, au bout d'un moment, je tape dans l'oeil de la jeunette qui
insiste sur le fait qu'il n'y a qu'une seule paire qui lui plaît : c'est moi ! la jolie paire avec une monture rose.
Finalement, les parents cèdent et m'offrent à leur fille ravie d'avoir eu le dernier mot et de pouvoir porter une si jolie paire de lunettes.
Une nouvelle vie commence enfin pour moi !
Texte de Danielle :
Voyage-Voyage* c’est
ma chanson…
C’est ma vie devant
ses yeux…
J’habite à la campagne
voyez-vous et personne mieux que moi ne pourrait vous dire combien cette
campagne est jolie et pleine de couleurs…Je voyage de pièce en pièce dans la
petite maison que j’habite avec elle, ma patronne. Elle a la bougeotte,
toujours curieuse de tout et mon travail est bien assidu pour lui montrer
toutes les lignes des choses un peu plus loin et plus loin encore ..son monde
est flou sans moi.
Dans la maison
derrière les fenêtres au nord je lui montre les jolies berlines qui passent ou
encore quelque chien docile que l’on emmène au canisite sauvage du bout de la rue. Mais c’est l’Ouest
que je préfère, sa ligne bleue des Vosges derrière les champs, le jardin avec
ses fleurs, ses arbres et ses oiseaux,
un coucher de soleil tout en feu certains soirs. C’est notre moment zen de la
journée.
Les moments les plus
terribles c’est le jour du ménage à chasser la poussière ou encore quand nous
partons en voiture. Là il me faut être très professionnelle pour ne pas devenir la vilaine
coupable qui n’aura pas vu une poussière bien cachée ou donné l’alerte
d’approche d’un as du volant qui chercherait à nous bousculer.
J’ai mes heures de
pause aussi bien sûr quand on m’oublie
quelque part ..je reprends des forces pour toujours mieux refléter ce monde qui
n’existerait pas pour elle sans moi. Je
me repose…avec un si grand regret pourtant, quand rangée dans le coin de la
pièce, je la vois parler, bouger, rire et rire encore avec d’autres autour de
la table…je suis si triste d’être née
sourde.
Je suis une petite
paire de lunettes pleine de courage et je sais que j’ai de la valeur pour celle
qui me porte. Je suis fière d’être son alliée chaque jour, de lui donner un peu
d’allure et de lui ouvrir un monde tout net. Mais chuuutt là il faut que je me
repose…demain c’est jour de travail, pas question de se tourner les branches, nous
partons en voyage…
C’est si bon d’être
important pour quelqu’un !!!
C’est ma vie ….